Vœu sur la formation initiale et les concours de recrutement

Par Société des agrégés, le 9 décembre 2023

Le Comité de la Société des agrégés, réuni le samedi 9 décembre 2023, a renouvelé son soutien indéfectible au recrutement des professeurs par des concours nationaux, disciplinaires et exigeants, comportant des épreuves écrites évaluées sous couvert de l’anonymat et des épreuves orales appréciées collégialement.

Un mode de recrutement démocratique et efficace

Le concours est, en effet, le seul mode de recrutement qui réponde à l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. Il est le seul qui permette de juger les candidats, dans des conditions de stricte égalité et avec les meilleures garanties d’impartialité, sur leurs connaissances et leurs capacités à les réinvestir et à les transmettre à l’écrit comme à l’oral.

Des concours disciplinaires sont également le moyen le plus efficace pour recruter des professeurs qualifiés, la maîtrise du savoir étant la première des compétences pédagogiques. C’est pourquoi la Société des agrégés est opposée à l’introduction d’épreuves dites professionnelles dans les concours du CAPES et du CRPE. Les candidats n’ont pas, en effet, le recul nécessaire à une réflexion sur les pratiques pédagogiques qui sorte de la répétition mécanique de recettes apprises.

Elle estime notamment qu’il est difficile d’évaluer objectivement l’épreuve d’entretien avec le Jury, introduite par la dernière réforme du CAPES, portant sur la motivation du candidat et son aptitude à se projeter dans le métier de professeur : une telle épreuve ne peut que conduire à des exposés artificiels et convenus, sans lien avec la maîtrise de la discipline. Elle demande donc la suppression de cette épreuve et son remplacement par une épreuve disciplinaire.

La place du concours dans le cursus universitaire

En ce qui concerne le CAPES, la Société des agrégés estime que l’hypothèse envisagée par le ministère d’un concours à bac + 3, en troisième année de licence, ne pourrait garantir la qualité du recrutement des professeurs certifiés, beaucoup d’étudiants n’ayant pas acquis, à ce stade de leurs études, un niveau de connaissances ni de méthodes suffisant pour pouvoir maîtriser plus tard leur discipline. Elle demande le retour à une année de préparation spécifique au CAPES après l’obtention de la licence, ce qui permettrait d’assurer une véritable exigence de niveau, tout en évitant d’engendrer une frustration chez des candidats reçus au concours mais collés à l’examen ou réciproquement. L’admission au concours donnerait l’équivalence d’un master 1.

Sans doute le projet ministériel a-t-il l’avantage d’accorder aux futurs professeurs, dès le master 1, le statut de fonctionnaire-stagiaire. Si le concours du CAPES a lieu à bac + 4, la création d’un dispositif donnant le statut d’élève-professeur, accessible dès la Licence aux étudiants qui se destinent à l’enseignement et qui signeraient un engagement décennal, pourrait être une solution pour financer de longues études tout en s’assurant un vivier de professeurs de qualité. Des bourses au mérite substantielles pourraient être également instaurées.

En ce qui concerne l’agrégation, il faut conserver l’organisation actuelle qui permet de présenter le concours si l’on peut justifier, au moment de l’admissibilité, de la possession d’un master 2. Des bourses au mérite suffisantes doivent être créées. Toutes facilités devraient être accordées aux lauréats du CAPES, qui manifesteraient une excellence disciplinaire, pour préparer l’agrégation externe, soit comme élève-professeur, soit en bénéficiant d’une bourse spécifique d’agrégation.

La formation pratique

Les futurs candidats peuvent, s’ils le souhaitent, éprouver la solidité de leur vocation à l’enseignement en effectuant un stage de quelques semaines dans un établissement scolaire avant de s’inscrire aux concours, comme ce fut autrefois le cas pour l’agrégation et comme des ENS le proposent à leurs élèves. Mais la maîtrise du savoir étant la première des compétences pédagogiques à acquérir, l’essentiel de la formation pratique doit se situer après le concours qui, s’il est bien conçu, aura écarté les candidats aux connaissances insuffisantes ou incapables de les transmettre avec rigueur et clarté à l’écrit comme à l’oral.

Cette formation doit exclure tout dogmatisme et préparer les professeurs stagiaires à l’exercice responsable de leur liberté pédagogique, en leur permettant de choisir avec discernement les méthodes les mieux adaptées aux classes qui leur sont confiées. Elle doit être principalement dispensée par des professeurs expérimentés, en contact avec le terrain, et sous la forme d’un compagnonnage où les conseillers pédagogiques font profiter les professeurs stagiaires de leur expérience, dans une relation de pair à pair. Elle doit aussi répondre davantage aux parcours et aux besoins individuels des stagiaires.

Il faudrait revoir en ce sens le contenu des masters MEEF pour les lauréats du CAPES, qui doivent avoir la possibilité, s’ils le souhaitent, de préparer, à l’Université, un master disciplinaire de recherche. Plus généralement, il faut avoir le courage de reconnaître que la formation donnée dans les INSPE n’est pas satisfaisante, qu’elle est inadaptée, souvent orientée, et que ces instituts doivent être profondément réformés.