Faire Société

Par Société des agrégés, le 15 février 2019

Faire Société

Si l’expression «faire société», qu’on attribue parfois à Émile Durkheim, a connu plusieurs vies, il me semble qu’elle peut, en cette fin d’année, définir l’action de votre Bureau et de votre Comité, fidèles aux desseins de nos pères fondateurs. En effet, en 1914, nos prédécesseurs firent le choix du terme «société», qu’ils préférèrent, après réflexion et discussion, au terme «association», considérant que ce dernier mot signalerait un corporatisme trop étroit. Or, dès cette époque, outre les conditions de travail des agrégés, l’ouverture sociale du concours et l’accès de l’agrégation au plus grand nombre de candidats méritants comptaient déjà parmi leurs préoccupations.

Dans «société», il y a les mille visages de notre organisation d’aujourd’hui. Le mot témoigne du lien particulier entre les sociétaires, il indique le caractère savant des activités que nous devons proposer, il invite à la solidarité et à l’entraide. On me prit un jour à partie en me jetant : «Eh, oh! Vous n’allez pas me dire que la Société des agrégés est une société de bienfaisance?». Je répondis que si. Et je l’appelle de mes vœux, je souhaite que la Société ait une action bienfaisante!

Le Bureau et le Comité sont attentifs à ce que la Société, fière de ses agrégés, protège les collègues, mette en valeur leur travail et leurs ouvrages, tende la main aux agrégatifs, s’ouvre à un public plus vaste grâce aux conférences et aux activités culturelles désormais permises par la Maison de l’agrégation, noue des partenariats avec d’autres associations. Nos bénévoles y contribuent chaque jour, l’un venant assurer régulièrement une permanence, un autre proposant des cours, un autre faisant don de sa bibliothèque, un autre encore organisant des rencontres. C’est une satisfaction de pouvoir constater que leur nombre a augmenté et que leur champ d’action s’est développé depuis plusieurs années.

Lors de la réunion du dernier Comité, sur proposition du Bureau, il a été décidé d’envisager la création d’un fonds de dotation, qui serait notamment alimenté par le produit de la vente des caves du 25 de la rue Descartes, utilisation symbolique et significative des fondations de pierre pour la création d’un outil permettant d’aider les collègues, d’offrir des bourses d’études, de décerner des prix, bref, de multiplier les moyens au service du concours et de l’excellence.

J’espère donc que notre Société aura toujours pour valeurs à la fois l’exigence et l’ouverture. Qu’elle gardera à l’esprit que le talent oblige, qu’on ne brille pas en écrasant les autres, que l’intelligence ne se signale pas par la méchanceté du mot d’esprit ni la force par la radicalité du propos. Dans un monde où il est si facile de haïr et si facile de se rendre haïssable, où il est plus simple de détruire que de bâtir, c’est la générosité qui demande le plus d’énergie, la bienveillance qui demande le plus de courage.

Blanche Lochmann- Éditorial de L’Agrégation n°495