Réforme de la formation initiale et du recrutement : le projet de cadrage des futurs masters M2E doit être impérativement corrigé
Par Société des agrégés, le 17 mai 2025
Le projet de cadrage des futurs masters M2E, destinés à remplacer les masters MEEF à partir de la rentrée 2026, qui a été présenté aux organisations syndicales, le 15 mai 2025, confirme malheureusement les craintes exprimées par la Société des agrégés.
La seule solution pour compenser le déficit disciplinaire dans la formation des candidats, résultant d’un recrutement des professeurs en troisième année de licence, est, comme l’a suggéré la Société des agrégés à plusieurs reprises, de prolonger la formation disciplinaire, dans une forte proportion, durant les deux années de master qui suivront l’admission au concours du CAPES. Or si, selon la maquette, le master est censé être « organisé avec 62 % de part disciplinaire », ce que met le ministère derrière cette formule a peu de choses à voir avec une consolidation des savoirs disciplinaires. Ainsi, dans le bloc 1 du master, intitulé « Concevoir, mettre en œuvre, analyser et évaluer des situations d’enseignement-apprentissage », la dimension disciplinaire (« Renforcer son expertise disciplinaire dans toutes les disciplines enseignées ») ne constitue qu’un des 8 éléments de la formation, tout le reste étant consacré aux pratiques professionnelles, avec toutes les injonctions didactiques et modes pédagogiques qui sévissent actuellement dans les INSPE. Dans ces conditions, la part réservée à l’acquisition des savoirs disciplinaires sera particulièrement réduite et notoirement insuffisante.
Le ministère semble ne pas comprendre qu’un professeur qui ne maîtrise pas sa discipline ne pourra jamais enseigner correctement, ce qui montre sa déconnexion totale avec la réalité de l’enseignement. Tout se passe comme si le ministère ne se souciait guère du niveau disciplinaire des futurs candidats aux concours de recrutement et qu’il entretenait le préjugé selon lequel il suffit pour enseigner d’exécuter quelques recettes apprises. Il prétend, contre toute logique, améliorer le niveau scolaire des élèves en réduisant les exigences disciplinaires dans la formation des futurs professeurs. Sans doute quelques universités, soucieuses de l’excellence disciplinaire et de leur réputation, feront-elles, en fonction de leurs ressources et de leurs traditions, des efforts pour maintenir le niveau d’exigence de leur formation, mais on ne peut se satisfaire que se développent ainsi des inégalités entre les territoires et entre les étudiants.
La Société des agrégés lance un avertissement solennel au ministère et au gouvernement. Il est encore temps de revoir la réforme dans le sens que lui ont indiqué la Société des agrégés et les organisations professionnelles soucieuses de la qualité de la formation et de l’enseignement, ce qui implique le recrutement de professeurs qui dominent leur discipline. Pour atteindre cet objectif, le recrutement à bac + 2,5, au cours de la troisième année de licence, entraîne déjà un handicap important dans la formation disciplinaire : si cette formation n’est pas suffisamment prolongée et approfondie lors des deux années de master, le ministère et le gouvernement deviendront complices, voire responsables, de la poursuite du déclin de l’enseignement scolaire.