Cauchemar

Par Société des agrégés, le 10 novembre 2014

Cauchemar

Alors que le Président de la République commence à dresser un bilan du choc de simplification administrative, c’est un électrochoc qu’il faut à l’Éducation nationale, incapable de traiter décemment les professeurs.

Elle a vraiment tout faux, Isabelle[1]. Vouloir passer l’agrégation alors qu’elle était certifiée, c’était déjà audacieux. Mais entreprendre de suivre une formation en M2, à ses frais, pour améliorer son enseignement et progresser dans sa discipline, c’était carrément suicidaire…

Malgré les embûches et l’absence totale d’aide ou d’accompagnement, Isabelle parvient à intégrer un M2 extrêmement sélectif. Malgré les embûches et l’absence totale d’accompagnement, Isabelle est admise à l’agrégation. A cause des embûches et de l’absence totale d’accompagnement, Isabelle risque de tout perdre.

Prévoyante, Isabelle a pourtant demandé en temps utile une mise en disponibilité pour pouvoir suivre les cours du M2 l’année suivante. Précisons que cette mise en disponibilité est un congé pour lequel elle ne sera pas rémunérée : à l’éducation nationale, on se forme à ses frais. Lorsqu’elle a appris qu’elle était admise et que la titularisation définitive comme agrégée exigeait qu’elle redevienne stagiaire pendant un an, Isabelle a cru logiquement que cette mise en disponibilité pouvait être convertie en report de stage, qui sous une autre appellation, revient au même : il s’agit de bénéficier d’un an non rémunéré en attendant d’effectuer son stage. Erreur fatale. Les choses auraient été bien trop simples.

En tant que certifiée, elle pouvait obtenir une disponibilité mais en tant qu’agrégée, elle n’a plus le droit d’obtenir un report de stage. Isabelle se retrouve donc heureuse lauréate et admise au M2 mais elle doit choisir entre les deux, sacrifier l’un pour sauver l’autre. Elle est désormais seule devant l’administration et devant des interlocuteurs qui, lui parlant de haut et méprisant son parcours, lui opposent sa méconnaissance des textes.

Que l’administration se mette enfin au service de l’enseignement et donc des professeurs. En leur créant les pires difficultés dans des situations pourtant simples à comprendre, elle nuit à la qualité de l’école et de l’université. Ce n’est plus un choc de simplification administrative qu’il faut pour sortir certains professeurs du cauchemar, c’est un véritable électrochoc.


[1] Le prénom a été modifié.