Agrégation 2013 : résultats

Par Société des agrégés, le 29 juillet 2013

Agrégation 2013 : résultats

Il faut se pencher de toute urgence sur l’agrégation encore épargnée par la désaffection qui touche le Capes et envisager un certain nombre de mesures : fin du recrutement en accordéon, calendrier rationnel de publication des postes offerts et des dates d’inscription au concours, revalorisation des salaires des agrégés, affectation correspondant réellement à leur statut, amélioration de leurs conditions de travail et de recherche.

L’agrégation, toujours attractive

Le caractère attractif de l’agrégation est confirmé : alors que près de 16% des postes offerts au Capes ne sont pas pourvus, toutes disciplines confondues, moins de 6% des postes offerts à l’agrégation ne le sont pas. Encore ce taux est-il dû, de toute évidence, au calendrier et au caractère trop tardif de la publication des postes dont le nombre a été connu près de trois mois après la clôture des inscriptions au concours[1]. Il était impossible aux candidats potentiels de savoir dans quelle mesure l’augmentation annoncée des postes dans l’Éducation nationale allait toucher l’agrégation, là où les candidats au Capes étaient sûrs de voir le nombre de postes augmenter. Par ailleurs, ce phénomène ne touche sérieusement que deux disciplines à l’agrégation.

Mathématiques et musique : le refus explicite du collège

La musique est la seule discipline dans laquelle le pourcentage de postes non pourvus à l’agrégation est supérieur au nombre de postes non pourvus au Capes (50% contre 38,5% au Capes). L’explication est simple : la discipline attire peu les futurs agrégés parce que les postes en collège sont bien plus nombreux qu’en lycée. Cette différence entre les deux concours ne se retrouve pas dans l’autre discipline artistique, les arts plastiques, qui offrent plus de débouchés aux agrégés dans les enseignements post-baccalauréat. Aujourd’hui, les étudiants de haut niveau en musique et musicologie préfèrent le supérieur ou les conservatoires, ou changent d’orientation.

Pour les mathématiques (17,39% pour 32,6 % de postes non pourvus au Capes), la concurrence existe sans conteste avec d’autres professions, plus gratifiantes aux yeux des potentiels candidats. Les modalités de la mastérisation ont pu aussi détourner de l’agrégation des étudiants qui se destinaient à la recherche. On sait en effet que dans les disciplines scientifiques, travaux de thèse et master 2 sont indissolublement liés. Se pose enfin un vrai problème de niveau des candidats en mathématiques dans les concours du second degré[2], ce qui peut susciter des inquiétudes sur le maintien de l’excellence dans cette discipline où les Français sont pourtant mondialement reconnus.

Les lettres classiques : une discipline de spécialistes

Le recrutement en lettres classiques accuse des différences immenses entre les deux concours : 100% des postes sont pourvus à l’agrégation de lettres classiques contre moins d’un tiers au Capes ! On y voit la marque certaine de l’évolution de l’offre des cours : devenus des options permettant d’engranger des points supplémentaires au baccalauréat, le latin et le grec attirent de moins en moins d’étudiants désireux de les étudier comme une discipline à part entière. Il y a un contraste inquiétant entre une désaffection pour la discipline dans le supérieur et une demande importante des familles : la question est vraiment de savoir quel latin et quel grec on enseigne aujourd’hui et on pourra enseigner demain.

Un recrutement à revoir

1. En finir avec les recrutements en « accordéon » qui sont contreproductifs et injustes : lors des années de fort recrutement, il est impossible de pourvoir tous les postes tandis que lors des années de très faible recrutement, des candidats de grande valeur sont recalés. L’admission dépend alors moins du niveau du candidat que de l’année lors de laquelle il passe le concours. Faudra-il donc, comme pour le vin, distinguer des millésimes plus ou moins réussis ?

2. Se concentrer sur l’enseignement disciplinaire : malheureusement, les candidats aux concours n’ont parfois plus le niveau requis et indispensable.

3. Revaloriser la profession pour attirer des candidats de haut niveau : elle passe par la reconnaissance du rôle intellectuel du professeur et la revalorisation des salaires.

Promouvoir les agrégés pour garantir l’excellence du vivier des candidats

1. Faire correspondre les affectations des lauréats à ce qui est annoncé aux candidats : le site du Ministère fait croire aux agrégés qu’ils seront nommés en classes préparatoires, dans les lycées et les établissements de formation tandis que l’affectation en collège est présentée, à la fin, comme une exception. Les candidats potentiels ne sont plus dupes.

2. Permettre aux agrégés de poursuivre une formation intellectuelle en les aidant à poursuivre leurs études doctorales et leurs travaux de recherches postdoctorales grâce à des aménagements d’emploi du temps et en leur offrant la possibilité de suivre une formation universitaire s’ils le souhaitent.

3. Valoriser les travaux de recherches et les compétences des agrégés en leur proposant de former leurs collègues du second degré dans leur spécialité, en facilitant leur participation aux journées et colloques auxquels ils sont conviés et en valorisant leur maîtrise des langues étrangères.

Les agrégés, cadres à haut potentiel de l’Éducation nationale, doivent être encouragés dans leur recherche d’excellence afin qu’à la joie d’avoir réussi le concours ne succède pas la désillusion devant le mépris pour cette première réussite et devant la méconnaissance du niveau sanctionné par l’agrégation.

 


[1] Le nombre de postes a été publié par un arrêté du 5 octobre 2012 alors que les inscriptions avaient lieu entre le 29 mai 2012 et le 10 juillet 2012 (arrêté du 23 mai 2012).

[2] Des membres du jury de l’agrégation de mathématiques avaient alerté l’opinion en février 2012.